Ce bonhomme de neige
Né du bonheur de l’instant, façonné par les assauts des naïfs qui ne sont pas encore happées par le temps, on lui confie cette identité emplie d’espoir.
Il est beau et on le photographie. On lui chuchote des secrets et on le considère.
Au centre de l’intérêt de chacun, il assiste à ces moments où l’existence se fige sur les rires des enfants.
Il reçoit quelques boules de neige. Il perd, parfois, un bras.
Il est coloré. Il sourit. Son nez est grand.
On l’encercle et court autour de lui.
Devenant le symbole d’une famille, on le contemple avec toutes ces étoiles qui habitent les yeux des jeunes heureux.
Et puis …
Tout le monde rentre se réchauffer.
Et pendant qu’ils sont à l’abri du vent et du froid, il se retrouve seul dans le champ blanc. La nuit arrive avec sa solitude …
On le regardera, encore, quelques fois en souriant, mais on l’oubliera si vite.
La chaleur reviendra et l’herbe réapparaîtra autour de lui. Comme une tâche d’un blanc sali, qui n’a plus rien à faire ici, il se figera, perdu, happé par l’oubli.
Comme celui qui essuie la vitre pleine de buée, il sera balayé.
Comme ce cœur, dessiné avec le doigt sur la plage avant que la vague ne l’efface, il disparaîtra.
Il deviendra fantôme difforme qui s’égare dans les limbes de l’absence.
Fondre. Pleurer sa peine. Devenir le reflet sinistre d’une image ancienne. Vilain. Abjecte. On ne le regardera plus en face, honteux de l’avoir aimé.
Solitaire de sa propre mort, il ne sera, bientôt, même plus un souvenir.
Dans l’omission la plus glaciale, on ira jusqu’à ignorer son existence.
Le vide.
On en refera un l’année prochaine de toute façon … tu verras … ce sera bien …
De ONE LOVE à EDEN KARMA22
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